6 jours en vallée d'Aspe
Objectif de la semaine : découvrir le cirque de Lescun en évitant au maximum les itinéraires "touristiques" et en prendre plein les yeux et les mollets !
J1 : Tour des aiguilles d'Ansabère - 16 kms - 1400 m D+
Nous empruntons le sentier qui mène aux cabanes d'Ansabère, sentier très parcouru car voie d'accès principale aux aiguilles d'Ansabère....
Le brouillard se déchire peu au-dessus de ces cabanes au moment de bifurquer en direction du col de la Chourique.
Nous apercevons néanmoins la petite aiguille d'Ansabère, vertigineuse, sur notre droite.
Les choses sérieuses commencent à partir du col : nous abandonnons le sentier qui part sur la gauche pour nous diriger tout droit dans un immense pierrier et contourner un espèce de ressaut rocheux. C'est dans cette zone désertique que nous apercevons un troupeau d'une trentaine d'isards, dont une partie, les plus curieux certainement, viennent se percher en observation au-dessus de nous...
C'est le moment de mettre le cap vers le premier sommet du jour...Il n'y a pas vraiment de sentier et c'est au "feeling" que nous prenons de l'altitude, escaladant parfois quelques rochers avant de découvrir qu'un passage plus facile existait quelques mètres plus loin...
C'est sans réelles difficultés que nous atteignons le Pic de Pétragème.
Et de un !
Pour ma part, je ne fais qu'un passage éclair au sommet : l'à-pic y est impressionnant et je recule rapidement vers un endroit où je retrouve mon sens de l'équilibre...
Nous avons désormais face à nous le deuxième objectif du jour : la grande aiguille d'Ansabère et sa foule des beaux jours...
La descente vers le col de Pétragème se fait sans difficulté et
la montée au sommet se fait en moins de 30 minutes . Et de deux !
Nous ne nous attardons pas sur ce sommet : beaucoup de monde !
Le temps d'observer le pic de Pétragème d'où nous venons et d'observer la suite du parcours et nous nous engageons sur la crête côté espagnol jusqu'à une petite échancrure que nous désacaladons pour prendre pied sur un chemin...
Le chemin disparait rapidement pour laisser la place à un terrain karstique composé de crevasses, de trou, d'altérations en tout genre ralentissant considérablement notre progression.
C'est un vrai dédale dans lequel nous devons être très attentif aux quelques cairns qui nous permettent de contourner les difficultés..
Nous devons fréquemment descendre légèrement pour remonter ensuite...Les pauses sont fréquentes : les cairns sont "fondus" dans le décor ....
Nous passons à proximité de quelques passages saisissants de verticalité
pour nous retrouver au pied du mur !
Difficile d'imaginer un cheminement dans cette muraille !
C'est pourtant sans grosses difficultés (on pose un peu les mains) et surtout sans danger
que nous atteignons le pic Mouscate. Et de trois !
L'endroit est sauvage à souhait : personne en vue.
Mais superbes vues sur le pic et la table des 3 rois
et sur le pic d'Ossau au loin
Et maintenant, direction le col d'Esquete, en espérant qu'un névé trop raide ne nous obligera pas à faire demi-tour!
Nous sommes toujours en zone karstique et devons être particulièrement vigilant à nos appuis : nous n'avons pas envie de nous coincer une cheville dans une de ces multiples mini failles !
Arrivés au col, nous sommes rassurés, nous allons pouvoir descendre ! Je propose à Flo de continuer vers la table des 3 rois ! "C'est bon, j'ai ma dose" me répond Flo !
La première partie de la descente, plutôt raide, se fait tout en glissade dans la caillasse et ce
n'est qu'au niveau de la cabane de Pedain que nous retrouvons un vrai sentier....
J2 : Pic de Countendé-Pic d'Anie - 16 kms - 1500 m D+
Après la belle journée d'hier, nous sommes "chaud pépito" pour enchainer les 2 sommets annoncés, si possible en évitant la foule de la voie normale du pic d'Anie !
Cette journée s'annonce également magnifique : pas de brouillard et un ciel bleu de chez bleu !
Le sentier est tranquille et c'est rapidement que nous remontons via le Gr 10 jusqu'à la cabane du cap de la Baitch.
Nous abandonnons le GR 10 pour continuer en direction du Pic d'Anie qui se dresse désormais face à nous.
C'est un peu au-dessus du Lac d'Anie (un laquette en fait) que nous abandonnons le sentier classique
pour remonter une trace tirant à gauche et navigant dans la rocaille
et les crevasses ( certaines sont sans fond visible ) .
Nous finissons par apercevoir le couloir d'accès au pic de Countende, pas spécialement impressionnant vu d'en bas...
En fait de couloir, il s'agit d'une cheminée qu'il nous faut escalader...Une dizaine de mètres à grimper....Les prises ont l'air franches....Mais que cela me semble vertical !
Devant ma circonspection, Flo s'élance....Pas de problème pour elle...Je suis le mouvement et la rejoint sans coup férir...
Elle m'annonce que la suite ne semble guère compliquée (nous sommes une dizaine de mètres sous le sommet) et décide de s'avancer pour "voir".
Je me sens de moins en moins à l'aise et au moment où je regarde en arrière, je sens la panique-vertige me gagner!
Flo m'indique qu'il n'y plus qu'un passage sur une vire de 10 cm à passer pour gagner le sommet et moi de lui répondre : "moi je ne vais pas plus loin ! Je ne bouge plus et je ne sais pas si je vais pouvoir redescendre!"
Je suis bien conscient qu'il va falloir redescendre, pas le choix et comme le dit Flo, si c'est passé en montant ça doit passer dans l'autre sens....
Je laisse donc passer l'orage, je reprends mon souffle et entreprend de descalader en essayant de ne pas trop regarder en dessous (il n'y a que quelques mètres auquel s'ajoute une ligne de fuite qui donnent cette sensation de vide ....) et c'est avec les muscles un peu tétanisés que je reprends pied sur le sol.
Flo m'indiquera que la petite vire à franchir par la suite était particulièrement "exposée" !
C'est donc sans regret que nous reprenons notre route vers le pic d'Anie sur un sentier pénible mais finalement "facile".
Nous arrivons à un col, que j'identifie comme étant le col de Countendé d'où partent des cairns en direction du sommet...Nous remontons donc cette croupe pour finalement nous retrouver sur un petit ressaut rocheux. Un petit cairn nous indique la voie : 2 ou 3 enjambées avec 300 ou 400 m de vide !
Pas d'hésitation pour moi : je n'irais pas plus loin. Flo essaye de me convaincre d'au moins essayer !
Mais non, hors de question pour moi : là, la moindre erreur serait fatale....Demi-tour sans hésitation.
Nous redescendons au col, puis reprenons le vallon en tirant légèrement vers la gauche pour retrouver une succession de cairns qui nous permettent de monter droit vers le sommet sans difficulté, même s'il faut parfois poser les mains, mais surtout sans danger !
Nous retrouvons rapidement une centaine de mètres sous le sommet...La suite est évidente : partir en travers pour rejoindre la crête sommitale. Mais il y a un hic : un névé "plongeant" nous barre la route...Et là, c'est Flo qui ne" le sent pas" !
Il n'y a pourtant qu'une dizaine de mètres à traverser mais là aussi, la moindre erreur serait fatale !
(nous croiserons pourtant un monsieur qui n'hésitera pas !).
Nous décidons de faire la pause casse-croute et profiter des superbes paysages, car malgré ces déconvenues, l'endroit reste magnifique.
Nous redescendons tranquillement jusqu'à l'embranchement avec la voie "normale"
et propose timidement à Flo, car me doutant de la réponse, de suivre le sentier classique et atteindre quand même ce ......de pic d'Anie....
Son regard fait office de réponse : ce sera retour direct au point de départ, les orgues de Camplong face à nous.
J3 : Table des 3 rois - 16 kms - 1500 m D+
La météo annonçant des risques d'orage en fin de journée, nous partons du plateau de Sanchèse avec pour objectif de ne pas trainer afin d'être de retour en début d'après-midi...
Et si le temps se dégradait plus vite que prévu : demi-tour.
C'est donc avec des objectifs intermédiaires que ce déroulera notre sortie.
1er objectif : les cayolars d'arnaye...Coup d’œil vers le ciel...Pas de nuages, donc nous continuons
et remontons ce vallon sauvage à souhait (nous n'y croiserons personne) vers les sources de Marmitou...C'est toujours le grand bleu.
Nous quittons le sentier principal qui se dirige vers le col d'Anaye pour tirer dans le cirque sur notre droite avec le pic d'Anie en arrière-plan
et rejoignons aisément le col d'Ourtets....Toujours pas de risque apparent d'orage.
Nous pouvons attaquer la partie la plus délicate car en zone karstique, donc sans sentier ni trace
et remontons d'immenses dalles fracturées....La pente se redresse
et nous plions nos bâtons désormais inutiles....Et c'est en mode quatre pattes que nous atteignons le dernier ressaut d'où nous apercevons la table des 3 rois et le pic du même nom.
A la vue du névé qui semble interdire l'accès au col entre les 2 sommets, Flo veut faire demi-tour !
Je lui propose d'aller voir de plus près de quoi il retourne, l'occasion d'apercevoir un isard isolé.
Il s'avère que le franchissement du névé à son point bas est sans danger ....la suite n'est qu'une formalité.
Et le sommet est un plateau qui semble débonnaire (nous n'imaginons pas la paroi verticale que nous découvrirons le dernier jour!)...
Le ciel, du côté espagnol, semble se charger ! Le casse-croute est vite avalé.
Pour le retour, j'aurais aimé de redescendre par le col de l'Hurs, mais j'ai peu d'espoir vu les conditions de neige cette année...
Flo m'incite à quand même aller y jeter un coup d’œil .
Mais non, le névé est bien là, bien raide et barrant intégralement le couloir !
ce sera donc retour par le même itinéraire, l'occasion pour Flo de jouer les équilibristes dans le lapiaz!
J4 : Tour du Pic Laraillé - 19 kms - 1700 m D+
Nous retrouvons l'itinéraire du jour 1 qui nous mène aux cabanes d'Ansabère
pour nous orienter sur un sentier facile qui part sur la gauche et nous amène rapidement au petit lac d'Ansabère.
Nous continuons de monter vers un col sans nom qui nous permet
d'embraser du regard les sommets des jours précédents malgré les nuages : Pétragème, Ansabère, Mouscate et 3 rois.
Le vent est glacial; c'est après avoir enfilés nos coupe*vents que nous atteignons un mamelon qui nous permet de profiter d'une vue circulaire
puis nous nous dirigeons vers un cirque en balcon de l'Ibon alcherito...
Nous devons faire le tour de ce cirque sur un terrain instable dans lequel nous perdons beaucoup de temps
mais contrepartie de la difficulté, nous avons tout loisir d'observer un troupeau d'isards.
Aux 3/4 du cirque, d'après l'analyse de la carte, je pensais trouver un passage qui nous permettrait de rallier directement le col de l'Araillé. Mais rien de franc dans la caillasse !
Nous préférons jouer la prudence et opter pour un tour complet de la zone....
Nous allons ainsi perdre environ 300 m de dénivelé et nous retrouver sur le Gr côté espagnol.
Nous rencontrons une famille française qui me permettra de consulter une carte espagnole, ce qui me permettra de mémoriser la trajectoire à suivre...
Nous commençons donc à remonter un bon sentier que nous abandonnons dès qu'il s'oriente vers le col de Pau.
A partir de là, nous passons en mode "navigation à vue" et boussole ! (Sur la carte espagnole, des pointillés semblaient indiquer l'existence d'un sentier) ce qui ne tarde pas à inquiéter Flo : "tu es sur que c'est par là ?"
Pour moi, c'est forcément par là...
Nous finissons par tomber sur un cairn, puis un second, puis....et nous voici au col souhaité.
Du côté français, c'est raide et ça fumaille !
Le sentier est parfaitement marqué et cairné, et malgré les nuages bas, c'est relativement facilement que nous en terminons avec cette boucle
J5 : Pic de Labigouer en boucle - 18 kms - 1200 m D+
Pas grand-chose à raconter sur cette journée : grosse montée dans la forêt avant de prendre pied sur la longue crête
qui nous permet d'atteindre le sommet dans un brouillard épais. Le vent est glacial....
C'est en mode "circulez, y a rien à voir" que nous redescendons
vers le col de Souperet et donc sous les nuages
Une longue descente nous mène à Aumet
Les 3 derniers kms se font en mode footing sur la piste-route...
Vraiment dommage que le temps n'ait pas été de la partie, le parcours tout en crête nous aurait certainement offert de belles perspectives sur le cirque de Lescun et les montagnes d'Aspe.
J6 : Dec de l'Hurs - 17 kms - 1400 m D+
Pour ce dernier jour à Lescun, je propose à Flo soit une boucle vers le refuge d'Arlet soit de tenter l'ascension d'un sommet belvédère (avec des incertitudes sur la partie finale cf déconvenue du jour 2) : Flo n'hésite pas ce sera le sommet;
le sentier grimpe facilement vers le lac de l'Hurs , l'occasion d'observer au loin le fameux névé du col de l'Hurs qui nous a empêché de réaliser une boucle au retour de la table des 3 rois...
Le lac est rapidement atteint et nous le contournons rapidement pour nous élever
rapidement et facilement dans la pente herbeuse
en direction du col sans nom.
La table des 3 rois émerge des nuages : l'occasion d'admirer la falaise dont on a aucune idée lorsque l'on est à son sommet !
Nous discutons avec un gars du coin qui nous indique que le sommet envisagé ne présente pas de difficulté.
Il nous indique également qu'à la base, il pensait monter à la table des 3 rois par le col de l'Hurs, mais qu'il a renoncé sans hésitation au vu du névé...Et de nous citer des accidents tragiques dans ce passage !
Nous finissons par reprendre notre route sur la crête....La pente se redresse et passe aux abords d'à-pics dont je m'éloigne.
Il y aura bien quelques passages où il faudra mettre les mains, mais rien de bien méchant.
Je n'avance pas très vite : j'appréhende d'être confronté au vide à chaque détour de rocher !
il n'en sera rien et nous profiterons du sommet pour faire la pause repas.
Flo, facétieuse, va faire son numéro d'équilibriste !
Nous amorçons notre descente face aux aiguilles d'Ansabère
avant de plonger dans la pente pour rejoindre la crête
Entre le col et le lac, nous ferons une dernière pause loin de la foule afin de savourer une dernière fois les paysages grandioses qui nous entourent
avant de nous résigner à redescendre dans la vallée, à redescendre sur terre.